Monsieur Emile Birgand est décédé le 19 avril 2006 et a rejoint dans le cimetière d'Ingrandes son cousin, Jean Ménager, "l'archiviste" officieux de la commune.


Horlogers de père en fils

Comme lui, Emile Birgand descendait, par la famille Clémot, de Dominique René Nicolle, invalide de la Marine Royale de Louis XIV, devenu gabelou à la veille de la Révolution. Ses descendants ingrandais sont plus sédentaires pusiqu'ils restent horlogers à Ingrandes pendant trois générations.

Les uns après les autres, ils ont la charge des horloges des églises d'Ingrandes et du Fresne (qu'il fallait remonter chaque jour).

Discret, courtois, précis, dans ses gestes et sa diction, Emile Birgand ne manque pas d'être frappé par les malheurs d'une existence : bombardements de 1944, maladies et deuils des plus chers. Cela le rend peut-être encore plus sensible aux souvenirs qui disparaissent et au désir de les transmettre, tout en conservant un humour froid et distancié.

C'est donc avec discrétion, mais opiniâtreté, qu'il se constitue son petit "musée" d'horloges dans le prolongement de son atelier, au fond du jardin de sa retraite. Il était toujours heureux de le présenter à quelques amis et visiteurs.


Une collection rare

En 1996, il réalise qu'une telle collection disparaîtra après lui et il fait le choix de la transmettre à la commune. Mr Bigot, maire, incite la municipalité à en faire l'acquisition, et propose au président du Syndicat d'Initiative de l'époque de la recevoir dans la Maison du Tourisme : Mr Gérard Fort prend pleinement conscience de l'intérêt de cette collection et, avec l'aide technique de Mr Birgand, il réalise une belle présentation en créant les supports ainsi qu'un montage vidéo qui permet à Emile Birgand de rester, au-delà de la mort, parmi ses chères horloges.

Mr Birgand a constitué sa collection à partir de 1970 en découvrant, dans la cour d'un brocanteur, une horloge d'édifice provenant de Saint Barthélémy. Les plus anciennes horloges datent du XIXème siècle. Lors de l'électrification des édifices publics, un grand nombre de mécanismes restent à rouiller dans les cavess des mairies ou les clocher des églises. Notre collectionneur les étudie puis les remet en mouvement en utilisant ce qu'il a sous la main : une queue de poêle, un morceau d'épuisette, bien dans l'esprit du temps où le matériau était rare et le travail patient sans limite.

La collection comprend aussi les beaux mécanismes plus sophistiqués de la fin du XIXème, toujours en état de marche, mais dont l'entretien est trop gourmand en temps pour notre époque pressée. Elles ornaient les églises mais aussi l'atelier et le magasin Tibergé, à Angers, avec un curieux balancier placé au-dessus de l'horloge.

Les spécialistes compareront les foliots, les échappements, simples ou doubles, l'arbre d'échappement, etc.

Mr Birgand a déposé aussi ses outils de bijoutier : les tours à archer, précis mais trop lents, l'estrapade pour remonter les ressorts, les oulis pour sertir les rubis du temps où ces pierres précieuses et dures servaient de pivots aux rouages de l'horlogerie.


Qui se souvient des communions solennelles avec les filleuls comparant les nombre de rubis de leurs montres offertes pour une vie entière ? Vers 1980, Mr Birgand m'a vendu sa dernière montre "Lip" à remontoir !

Jean-Baptiste Glotin
pour l'association "Culture et Patrimoine
bulletin municipal, juin 2006